C’est certainement le plus gros défi que les cadres d’entreprise et les hommes d’affaires ont à relever. Que ce soit au cours d’une réunion d’évaluation, lors de la présentation de rapport, au cours d’une cérémonie officielle, lors d’une présentation de produit ou autre instance, nous sommes de plus en plus appelés à prendre la parole en public. Et cela devient simple lorsque nous savons appliquer quelques règles aussi bien pour le travail que nous avons à faire sur nous-mêmes que la préparation de nos prises de parole en public, les autosuggestions nécessaires pour renforcer la confiance en soi et développer l’aisance. En voici les 12 règles les plus déterminantes.
- La prise de parole en public n’est pas une question d’éloquence mais de personnalité. Travaillez votre personnalité et vous réussirez davantage vos prises de parole en public.
Lorsque les gens me sollicitent pour les coacher à réussir leur prise de parole en public, je commence toujours par leur dire qu’ils savent bien prendre la parole en public. Et lorsqu’ils me disent qu’ils sont timides de nature ou qu’ils n’ont pas confiance en eux, je leur dis aussi que personne n’est timide face à des gens à qui il est habitué. Il suffit de s’entrainer et de s’habituer à prendre la parole en public et la timidité s’en va progressivement. Ensuite je leur propose de travailler à améliorer leur personnalité et une fois que leur personnalité est améliorée, le reste devient facile. La vérité, c’est que lorsque je finis de travailler sur leur personnalité, ils commencent progressivement à développer l’aisance. Nicolas Sarkosy est tout aussi éloquent que Barack Obama. Mais la différence entre leurs personnalités respectives impose les bases de l’efficacité de l’un ou de l’autre face à son public.
Si vous voulez améliorer l’efficacité de vos prises de parole en public, améliorez votre personnalité parce qu’une personne méprisante ou coléreuse ne peut pas réussir ses prises de parole en public même s’il est éloquent et confiant. Faites-vous coacher pour améliorer votre personnalité et la confiance en soi suivra.
- Il est moins important de réussir sa prestation que d’avoir de l’impact. Alors n’oubliez pas l’objectif pour lequel vous prenez la parole. Il est plus important que votre prestation
Un jour alors que j’avais fait un passage télé pour annoncer un évènement, à peine sorti du studio, je reçus l’appel d’un ami qui tenait à me féliciter pour « ma brillante prestation ». J’acceptai ses félicitations mais pour m’assurer que j’ai eu de l’impact, je lui demandai ce qu’il pensait de l’évènement que nous organisions. Il me demanda : « Quel évènement ? ». En réalité, il n’a pas retenu grande chose…
Je puis dire que c’est devenu facile pour moi maintenant de prendre aisément la parole en public et pour vous dire la vérité, je n’ai jamais travaillé sur l’aisance et je ne me pose pas la question de savoir si je suis à l’aise. La question qui me taraude le plus est celle-ci : Comment FAIRE pour avoir de l’impact et obtenir les résultats poursuivis par ma prise de parole en public ? Beaucoup de candidats aux élections présidentielles, municipales et législatives ont été souvent distraits par l’engouement que suscitent leurs différents passages sans se demander si au fond ils sont en train d’avoir l’adhésion du public.
- L’aisance n’est pas une fin en soi. Même si vous tremblez, assurez-vous de toucher le cœur du public en reprenant votre faux pas à votre compte
Les deux plus grandes peurs au monde restent les deux plus grandes peurs au monde : 1) La peur de prendre la parole en public et 2) La peur de tomber et mourir pendant sa prise de parole en public. Il est normal que chaque fois que nous prenons la parole que nous fassions attention à si nous sommes à notre confort. Personne ne veut trébucher en prenant la parole en public et naturellement personne ne veut tomber et mourir en prenant la parole en public. Il est normal que nous nous focalisions sur le fait d’être à l’aise nous-mêmes. Mais en fait, le but est de mettre le public à l’aise, de se connecter avec lui, de l’entendre vous dire qu’elle est bien avec nous malgré notre vulnérabilité.
Je me rappelle un de ces jours où je devrais animer une formation en anglais alors que je m’étais préparé pour la dérouler en français. Je tremblais, je commettais des fautes…Les amis qui étaient dans l’auditoire me montraient de leurs regards qu’ils étaient avec moi. J’ai tout transformé en humour et je leur demandais de me donner le mot équivalent en anglais lorsque je me perdais ou avais des trous d mémoire…Et lorsque c’était possible, je parlais le Fongbé, le mina. Je faisais rire tout le monde. Alors que je me débattais pour passer d’une langue à l’autre pendant que je m’efforçais de passer mon message, ce fut à mon actif puisque la plupart des gens étaient impressionnés par combien je pouvais passer d’une langue à l’autre avec « autant de facilité ». Je tremblais, j’avais chaud mais le public était connecté – et c’était la chose la plus importante.
- Contrairement à ce que la plupart des gens se disent, tous les publics aiment entendre des histoires personnelles. Débutez par une anecdote, votre histoire personnelle très émouvante.
L’une des meilleures façons de vendre aujourd’hui aux Etats-Unis, aussi bien pour collecter des dons, vendre ses services ou encore trouver des investisseurs, ou sensibiliser sur des décisions politiques à prendre, c’est de raconter sa propre histoire ou une histoire personnellement vécue. Nous avons été forgés pour ne pas parler de nous et chercher à parler des autres mais tout le monde aime les histoires émouvantes personnelles.
Naturellement, les gens ne veulent pas vous entendre dire tout ce que vous avez réalisé. Ils veulent que vous leur racontiez de la manière la plus authentique et émouvante possible ce que vous avez vécu…En vous entendant parler de tout ce que vous avez vécu, ils se diront : « Ah ouais, il a pu subir tout cela ? » ou encore « La même chose m’est arrivée…J’aurais pu tenir comme lui »…C’est facile d’être le héro des gens au 21è siècle pour peu qu’ils se retrouvent en vous…Cela suppose que vous acceptiez vous laisser découvrir et leur montriez ensuite comment vous avez fait pour tout surmonter. Pleurez si vous voulez…La vulnérabilité est plus efficace en prise de parole en public que l’aisance arrogante…
- Les gens ont horreur des donneurs de leçons, mieux ils connaissent ou finiront par découvrir votre vraie histoire au cas où vous essaieriez de la cacher. Alors soyez authentique et pratiquez l’autodérision.
Comme vu plus haut, la vulnérabilité est plus efficace en prise de parole en public que l’aisance arrogante….Pourquoi ? Parce ce que ce n’est pas de vous qu’il est question. Les gens ne supportent surtout pas ceux qui se prennent trop au sérieux…Ils n’aiment surtout pas les gens qui veulent leur montrer qu’ils ne connaissent rien…Ils ont encore plus horreur de ceux qui viennent étaler leurs réalisations ou diplômes…j’ai ceci, j’ai cela…j’ai même été à…
Comme le dit la règle : « Si vous n’êtes pas prêt à parler de vos failles, ne parlez pas de vos exploits ». La simplicité, l’utilisation des questions, le regard bienveillant porté sur le public, la recherche des similitudes d’avec lui, le fait de parler avec compassion et inclusion sincère des choses qui le concernent est l’autre méthode pour montrer aux gens qu’on n’est pas « tout », qu’on ne connait pas « tout » et qu’on a à apprendre d’eux. A quoi sert tout le reste, votre contact ou votre rencontre si ce que les gens sont, font et ont n’a aucune valeur pour nous ? Réussir sa prise de parole en public, c’est savoir s’ouvrir pour s’intéresser aux autres aussi bien qu’on se sait intéressant. Même si vous savez tout, montrez aux gens que vous voulez apprendre d’eux.
- Si votre prise de parole n’est qu’une formalité, sachez que les gens sont pressés que vous la remplissiez et partiez. Montrez aux gens que vous voulez faire partie de leur contexte et de leur circonstance
Pour montrer clairement que vous voulez être très catastrophique dans votre prise de parole, lisez votre texte et partez sans jamais lever la tête pour regarder les gens. Lisez votre texte de A à Z sans jamais jeter un regard sur le public pour lui laisser entendre que vous êtes d’abord là pour lui et non pour accomplir une formalité et ils seront pressés que vous dégagiez afin que les choses sérieuses commencent. La règle est simple : si les gens sont en fête ou se préparent à la fête, montrez-vous que vous êtes bien de la fête vous aussi. S’ils sont émus par quelque nouvelle lourde, montrez-leur que vous portez le poids avec eux et que vous êtes de cœur avec eux. S’ils ont des besoins, montrez-leur avec compassion que vous comprenez leurs besoins et citez-les avec présence.
Et si vous savez que vous n’avez pas toujours été à la hauteur des attentes, sachez prononcer des phrases historiques comme celle qu’a pu prononcer le feu Président Omar Bongo Ondimba : « Dieu ne nous a pas donné le droit de faire du Gabon, ce que nous sommes en train de faire ». Et pour le dire, il a su laisser tomber le beau discours écrit. Cette phrase est restée dans le cœur des gabonais ou tout au moins la mémoire des gabonais. Pour toucher les cœurs, il faut savoir parler du fond de son cœur. Comme on a pu le dire un jour une brillante cadre de la BICICI alors que nous animions pour eux un coaching de groupe sur les secrets de prise de parole en public : « Il faut savoir porter son discours dans son cœur et non dans sa tête ».
- Le message que vous voulez passer n’est pas aussi important que le message que les gens veulent entendre. Pratiquez la loi des « 2A » pour optimiser l’impact sur votre auditoire
John C. Maxwell l’appelle la loi de la connexion. Les leaders touchent le cœur avant de commander les bras. Lorsque nous avons l’opportunité d’avoir un public en face de nous, nous sommes pressés de leur délivrer le message que nous avons, le message qui nous préoccupe et que nous sommes pressés de les voir entendre mais les grands présentateurs ne procèdent pas ainsi. Ils savent que pour avoir l’adhésion des gens, il faut leur dire ce qu’ils veulent entendre avant de leur dire ce qu’ils doivent entendre. Le style utilisé par les grands leaders qui savent mobiliser les cœurs et les têtes s’apparentent à ce qui suit :
« Savoir que des gens aussi braves et aussi engagés que vous sont avec moi et me soutiennent chaque jour – chacun apportant une contribution déterminante à notre succès commun- est quelque chose qui me touche énormément. Au début du trimestre écoulé, je vous avais dit combien j’avais besoin que nous redoublions d’effort pour combler notre déficit et vous avez été là pour moi et avec moi ; ce qui nous a permis de relever le défi ensemble. Des efforts significatifs restent à faire pour pallier au plus vite au recul de nos performances. Je suis heureux de savoir que vous allez être avec moi à nouveau. Nous allons devoir subir quelques coupes– des coupes difficiles à accepter déjà pour moi-même…Et je sais combien ce sera difficile pour nous tous, vos familles, nos familles. La seule chose qui me permet de regarder les prochains mois avec foi et grande espérance, c’est que j’ai des gens comme vous avec moi…Je voulais juste m’assurer de ce que vous allez être avec moi…et que nous allons pouvoir relever le défi ensemble….
- Même aux obsèques, les gens s’attendent à ce qu’une petite dose d’humour leur soit servie. N’oubliez pas de faire rire…quelle que soit la circonstance.
J’étais en train d’animer un séminaire sur la prise de parole en public pour les experts comptables et auditeurs à Dakar et la question était de savoir si l’on pouvait utiliser l’humour lorsqu’on doit présenter des rapports devant un Conseil d’Administration. J’ai commencé par dire que la réputation que les auditeurs et les experts comptables ont pour être des gens trop solennels devrait se servir du sens de l’humour pour décomplexer un peu l’ambiance. Ensuite je leur ai demandé d’observer les administrateurs la prochaine fois qu’ils arrivent à un Conseil d’Administration. Ils constateront qu’ils sont pleins de sens de l’humour et que les commissaires aux comptes sont les seuls à être drôlement trop sérieux et trop pressés de démarrer leur présentation…Après des échanges, nous avons retenu qu’il était bien possible pour eux de démarrer par une anecdote, d’utiliser l’ironie…de raconter une petite histoire et de faire ensuite la transition… Entrainez-vous à l’humour parce que les interventions meilleures sont ponctuées de rire
- La question la plus importante lorsque vous faites une présentation, c’est de vous demander si les gens suivraient s’ils avaient une copie de votre présentation. De ce fait si vous avez une présentation Powerpoint, ne la lisez pas
Sans doute qu’il faut porter son discours du fond de son cœur et non dans sa tête. Hier pour animer une conférence, vous pouviez vous permettre de présenter un bel exposé écrit et venir le lire devant les gens. Comme c’était ennuyeux quelles que soient les belles tournures. Aujourd’hui, nous avons la possibilité d’utiliser des présentations PowerPoint. Et chose normale, les gens s’attendent à ce que nous ayons une conversation avec eux et non avec les diapositives. Ils veulent que nous nous tournions vers eux et non vers les diapositives. Et mieux, ils s’attendent à ce que nous ne lisions pas sur l’écran ce qu’ils peuvent bien lire eux-mêmes surtout lorsqu’ils voient qu’ils peuvent mieux le lire et mieux l’expliquer que nous. Utilisez des images, des illustrations, des graphes que vous allez expliquer, des puces pour résumer quelques points clés. Appliquez la règle des 30 X 6 c’est-à-dire la taille de police 30 pour les mots et 6 mots maximum par ligne…
- Pour mieux contribuer à l’opportunité que vous offrez de réfléchir et ingurgiter votre message, posez des questions qui amènent les gens à réfléchir par eux-mêmes. Pratiquez l’art des questions
Autant nous ne pouvons pas nous permettre de nous poser en donneurs de leçon, autant nous devons laisser clairement entendre aux gens que leur contribution est importante. Si c’est une formation que vous animez, posez des questions et lancez un débat pour faire réfléchir et contribuer votre auditoire. Si vous faites un discours, vous pouvez toujours faire réfléchir le public pour l’engager davantage comme Obama l’a fait dans son discours historique à la Convention du Parti Démocrate en 2004. Il a lancé une série de questions qui a réveillé le public…Sachant que « amener les gens à prendre conscience » est l’un des objectifs majeurs d’une communication, le fait de poser des questions reste la meilleure façon de faire prendre conscience parce que les questions amènent les gens à analyser la situation et à voir clairement les contradictions par eux-mêmes. Exemple : « Allons-nous laisser cette situation perdurer ? Pouvons-nous nous permettre de rester là les bras croisés et laisser l’histoire retenir que nous avons été des complices passifs ? Quelle réponse donnerons-nous à nos enfants lorsqu’ils nous demanderont : « Qu’aviez-vous fait pour éviter ce qui est arrivé ? ».
- Les gens veulent apprendre quelque chose de nouveau ou de marquant lorsqu’ils vous écoutent.N’oubliez pas de faire retenir l’essentiel de votre intervention
Quelle quoi soit notre éloquence, quelle que soit la quantité et même la quantité des informations pertinentes que nous aurons transmises, les gens doivent savoir l’essentiel qu’ils doivent retenir. Si vous réécoutez le discours historiquement intitulé « I have a dream » de Martin Luther King, vous remarquerez qu’il voulait vraiment que les gens retiennent au-delà des frustrations qu’il pouvait décrire que le rêve d’un espoir est possible. Il a su utiliser la répétition pour y arriver. Et c’est l’essentiel que son auditoire et l’histoire ont pu retenir. Lorsque vous prenez la parole, assurez-vous de l’essentiel que les gens doivent retenir. On appelle cela la méthode des 140 caractères de Twitter. C’est cette méthode que les fondateurs de Google ont utilisée pour lever des fonds et financer leur entreprise à ses débuts. Lorsque les investisseurs leur ont demandé ce que faisait Google, ils ont répondu : « Google donne accès à l’information mondiale en un clic ». N’oubliez pas l’essentiel à retenir donc lorsque vous prenez la parole en public.
- La pire erreur que vous puissiez commettre lorsque voulez renforcer votre capacité de prise de parole en public, c’est de fuir les opportunités de prise de parole en public. Appliquez la règle de l’exorcisme par la pratique : « Multiplication des opportunités de prise de parole + Entrainements »
Une fois que vous aurez démarré un processus pour travailler votre personnalité (un programme de coaching sera nécessaire certainement), une fois que vous vous êtes préparé à passer les 11 étapes précédentes, la seule chose qu’il vous restera à faire pour devenir un as de la prise de parole en public, c’est de multiplier les occasions que vous avez de prendre la parole en public. Et avant d’aller saisir chaque opportunité, entrainez-vous et familiarisez-vous avec vos présentations ou messages jusqu’à pouvoir transformer votre prise de parole en public en une conversation naturelle. Entrainez-vous devant un miroir. Filmez-vous, enregistrez-vous et écoutez ensuite. Corrigez-vous, demandez l’aide d’un coach professionnel si possible pour vous encadrer, vous transformer et vous relooker. Multipliez les opportunités de prise de parole et entrainez-vous à fond pour les saisir aisément et efficacement.
Par Hermann H. CAKPO
Coach, auteur et co-fondateur The H&C Group